Princesse-Wololo-Manala

Un désert sous la pluie

Dimanche 18 décembre 2011 à 19:10

 

Il y a quelque chose en toi qui satisfait la femme-objet qui est en moi. Cette même chose fait pleurer l’amoureuse qui est en moi. Qu’est-ce-qui fait qu’on chosifie quelqu’un ? Est-ce plus facile, plus supportable de se tenir face à un objet que d’interagir avec un être humain ? Sommes-nous trop nombreux dans la vie de chacun pour parvenir à tous se considérer comme des possibilités de vie plutôt qu’en des termes commerciaux ? Est-ce-que notre vision de l’Autre se floute, notre intuition est-elle anesthésiée au point de nous faire croire que nous nous ressemblons tous ? Ou sommes-nous devenus si complexes que les étiquetages et autres mises-en-tiroir se sont imposés à nous ? Sommes-nous trop occupés par notre carrière pour prendre le temps de se demander ce qui se cache derrière ce visage, à quoi ressemble-t’ il lorsqu’il pleure, qu’est-ce-qui nous est commun dans notre humanité ? As-tu aussi peur d’aimer ? Peur de cet amour qui te plonge dans une dangereuse solitude, une solitude qui te fait perdre toute consistance… Il n’y a que ta peur entre nous, c’est elle qui nous rassemble, elle t’attire et te rejette, elle fait de toi sa chose. Toi, mon amour, qui fait de moi ta chose.

Dimanche 18 décembre 2011 à 17:21

 

1er épisode :

En fait, je l’avais déjà choisi. C’est lui qui m’a vendu mon ticket en prévente. Un brun à lunettes, très sérieux, l’air afféré, la bouche fine de mon cousin. Je le savais depuis le début, ce serait lui et personne d’autre. Les geeks, ça m’attire. Les mecs qui se tapent si peu de meuf que je serai forcément marquante pour eux. J’ai dansé, bu, je l’ai attendu, il est venu, je ne l’ai plus lâché. Il nous servait des shooters infâmes au goût indéfinissable. Il disparaissait, réapparaissait. Il n’était pas intéressé et c’est ça qui me plaisait. Dans la houle de testostérone, je déambulais à sa recherche. Nous avons commencé à danser ensemble lorsque la lumière s’est allumée. Rien de très sexy, un rock je crois. Au bar, il me tournait le dos et je mis ma main sous sa chemise. J’adore les hommes de dos. De dos en train de pisser, de dos en train de faire la vaisselle, de dos au lit. Il a décidé de partir, je suis partie aussi de mon côté. J’étais trop bourrée pour insister. Contre toute attente, il m’a rejoint dans le couloir. Quand même, un casque bleu ne peut pas se permettre de louper une occasion pareille. Le casque bleu est celui qui est toujours au front mais ne tire jamais. J’appris par la suite qu’il avait été élu casque bleu de l’année 2010. Quelle fierté j’en tirai ! Cela n’a fait que me conforter dans mon choix. Je décidais de le laisser entrer dans ma chambre. Il me serra contre lui et me bouffai la bouche comme le ferait un diabétique d’une guimauve à la fraise. Très rapidement, il m’attira sur mon lit et se mit à me mordre les tétons et à m’enfoncer ses os iliaques dans l’intérieur des cuisses. Je ris et lui dit « eh ben, t’es fougueux, toi ! ». Il me répondit « je suis quoi ? ».  « Fougueux. Ça veut dire que t’as envie, que t’es passionné quoi… ». Manque de vocabulaire, un point en moins. En mode homme de Cro-Magnon type « moi vouloir toi », un point en plus. Et puis, une idée lumineuse m’est venue. Mon cerveau baignant dans la vodka-pomme formula un drôle de scénario pour les circonstances : j’allais me refuser à lui, le faire languir pour qu’il vienne demain gratter à ma porte. Je lui dis « Attends, j’peux pas, j’veux pas, j’m’attendais pas à ça… ». Il s’allonge sur mon lit alors que je continue, ambivalente à lui caresser le ventre et remarque soudain qu’il s’épile les aisselles. Complétement imberbe. J’adore ça, j’ai envie de lui lécher la peau et d’en récolter l’humidité fauve du bout de ma langue. Je le regarde et le trouve très beau. « Mais tu viens d’où en fait ? » « De Marseille. ». Je ris. Je déteste Marseille. Quelques minutes plus tard, il se lève soudainement pour : remonter mon volet, ouvrir ma fenêtre et vomir sur le rebord, penché au-dessus de mon bureau. Bon. Si j’hésitais encore sur le fait de coucher avec lui ou pas, cette dernière effusion romantique me décida. Ce sera plutôt « ou pas ». Pourtant, il ne baissa pas les bras. Il se rinça le museau et reviens dans mon lit, tentant de m’embrasser encore. Devant mes expositions de nuque pour ne pas salir ma bouche, il finit par s’affaler et s’endormir bruyamment dans mon petit lit 1 place. De façon à la fois surprenante et prévisible de ma part, je fus heureuse d’avoir un homme endormi dans mon lit, de dormir de façon superficielle bercée par ses ronflements et son parfum animal, témoin d’une vulnérabilité qui n’est pas donnée à voir à tout le monde. Le lendemain, je le réveillai pour lui demander de s’en aller. Il me demanda pourquoi. Je lui dis : « J’ai un mémoire à écrire », il dit « Genre… » et partit.

Au final, tout ce que j’y avais gagné c’était l’envie de recommencer, et avec lui, en plus. C’est idiot, n’est-ce-pas ?


2ème épisode :

Après avoir bien sécurisé ses arrières par une correspondance e-mail sans équivoque, il accepta de revenir chez moi 3 semaines plus tard. Par « sécuriser ses arrière » j’entends qu’il m’a bien fait comprendre par des tournures du style « je m’en vais bientôt, je ne cherche rien de sérieux » que ce qu’il voulait c’était « me mettre un petit coup quand l’excitation d’être avec ses petits copains se meure et qu’il a un taux d’alcoolémie suffisamment élevé pour se lancer ». Je relève le défi de devenir plus excitante que ses copains et que l’alcool en me lançant dans une grande entreprise de séduction, constituée de flatteries et de « suis moi et je te fuirai ». Je parviens donc à l’attirer dans ma toile un soir à 23H15. Ce que j’aime chez lui, c’est la teinte de ses yeux bruns-verts et son sourire de loup. Je suis comme hypnotisée. Nous buvons du vin rouge. Je me mets à raconter des conneries de fille facile comme à chaque fois que je suis nerveuse. Je parle de papis frotteurs et de sondes vésicales, de prématurés et de schizophrènes, de perspectives d’avenir et d’Akhenaton. Je ne comprends pas qu’il ne m’ait pas bâillonnée dès le début de la soirée. Il était sans doute trop occupé à regarder sa montre Casio digne d’un vrai marseillais qui ne connait pas IAM. Nous jouons avec mes menottes, ça a l’air de beaucoup lui plaire de me voir à genoux sur mon lit, à être appréhendée pour avoir invité un inconnu dans ma chambre. Je bredouille un « mais c’est pour qu’il devienne un non-inconnu, monsieur l’officier… ». Il s’en fout. A ses yeux, j’ai été une salope de lui avoir couru après à la déjante et ce statut de salope me collera toujours à la peau. Je peux juste encore sauver les meubles mais la maison restera en carton. Il finit tout de même par mettre ses bras menottés autour de mon cou et par m’embrasser car, comme il le dira plus tard, lorsqu’on a un engagement, on s’y tient. J’aime la douceur de sa moustache sur mes lèvres et sa façon de me caresser, les doigts bien ouverts comme s’il ne voulait pas en perdre une miette. Je lui enlève sa chemise et lui caresse les cuisses. Son pantalon est rugueux et le contraste est grand par rapport à la peau mate de son ventre. Lorsqu’il ne lui reste que son caleçon et que je ne suis plus qu’en petite culotte, je lui demande de tenir mes cheveux et lui découvre le sexe. J’avais du flairer qu’il était hyper excitable car je commence très très doucement à lui embrasser le gland. Je sens qu’il est tendu et de sa main sur ma tête, il hésite : il m’attire vers son sexe et m’en éloigne dès que j’en suis trop proche, dès que ma langue peut passer sur son organe palpitant. Cette façon de me vouloir et de me repousser à la fois est grisante. Il me dit dans la brume de nos corps brûlants : « Si tu continues comme ça, ça va pas le faire… ». J’entends ce qu’il me dit sans vraiment l’intégrer, sans comprendre à quel point ça ne va pas le faire. Je m’allonge et le laisse me caresser en m’embrassant. Je suis totalement présente à ses mains et au goût de ses lèvres plus sucrées que le vin. Je guide ses doigts à l’intérieur de mon sexe et il frotte sa paume contre mon clitoris. Je gémis tout près de son oreille alors qu’il regarde mon ventre se soulever au rythme de son bras. Rapidement, il se tourne pour récupérer le préservatif qu’il avait laissé à portée de main et s’apprête à le mettre. Je lui demande, surprise, « Tu veux la mettre maintenant ? ». Il me répond un « oui » franc qui ne tolèrerait aucun marchandage. Moi qui aurais tellement aimé le sucer. Paré pour l’action, il se place au-dessus de moi et dirige son sexe vers le mien. Je l’empoigne afin de l’aider. Il me souffle « attends…attends… ». Je ne comprends pas ce que je dois attendre. Il me pénètre une fois. Je crois sentir les secousses de la jouissance dans son membre. Il se retire. Je tente de le réintroduire. Un nouveau « attends…attends… » me permet de comprendre ce qu’il vient de se produire. Je le regarde dans les yeux, « t’as joui ? ». Il me dit oui et il rit. J’aime son rire et je ris avec lui. Je me dis immédiatement « Ouiiiii ! Ça veut dire qu’on va le faire une seconde fois ! ». Et là, grosse débandade, il regarde sa montre de merde et dit  « je dois y aller ». Il est gêné, il me demande si je suis déçue, me dit que ce n’était certainement pas ce à quoi je m’attendais, que c’est de sa faute, que ça ne se fait pas de partir comme un voleur mais il se casse quand même et vite en plus, très vite, quasiment en courant. C’est le moment où le public lance de grands « Bouhou ! Nul ! Pauv’ naze ! Goujat ! Rustre ! Grossier personnage ! Salop ! Enculé ! Remboursés… » et se murmure des « Regardez la pauvre jeune fille. Déshonorée, abandonnée, salie… Enfin, c’est de sa faute aussi, elle n’avait qu’à pas faire la catin. Inviter un garçon chez soi et lui exprimer un désir sexuel mais vous n’y pensez pas ! Nous ne sommes qu’au 21ème siècle après tout. Encore une femme qui a mal été castrée, voyez le résultat ! » Scénario assez banal, j’imagine. Une chose pourtant m’a surprise : il a récupéré le préservatif usagé sans que je le vois. Pourquoi faire cela au lieu de le mettre à la poubelle chez moi ? Est-il célèbre ou richissime et craint-il que je récolte son sperme à des fins de fécondation ? Aurais-je pu le vendre à prix d’or sur internet ? Aurais-je pu m’en servir pour des expériences de clonage humain et il ne souhaitait pas un jour, croiser son double plus jeune et plus beau dans la rue ? Ou avait-il peur que je juge de la quantité trop importante ou vraiment ridicule de sa production ? Un garçon vraiment surprenant...

Au final, tout ce que j’y avais gagné c’était l’envie de recommencer, et avec lui, en plus. C’est idiot, n’est-ce-pas ?


 

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